Francis Cabrel chante pour la première fois à Lisbonne
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Francis Cabrel rêvait de chanter à Lisbonne. Il sera sur la scène du Grand Auditorium du Centre Culturel de Belém le samedi 3 février 2024 pour une seule soirée dans le cadre de son Trobador Tour. Rencontre avec un auteur-compositeur-interprète chaleureux et authentique.

Connaissez-vous le Portugal ?

Pour mon premier voyage au Portugal, j’ai traversé l’Espagne en voiture. J’étais parti de mon village d’Astaffort et je suis arrivé à Porto. Je me souviens avoir séjourné à côté d’Amarante. Je suis ensuite revenu pour des vacances à Lisbonne et plusieurs fois dans le sud du Portugal. Mais je n’y ai jamais chanté. En février, je vais essayer de rester un ou deux jours de plus pour visiter la ville.

Qu’allez-vous chanter ?

Des titres anciens et plus récents. Mon dernier album est sorti depuis quatre ans. Il évoque les troubadours et la langue occitane qui m’est chère. Le récital balayera toute ma carrière. Je chante depuis quarante-cinq ans, vous vous rendez compte ! Le public, quel qu’il soit, réclame les vieux tubes. Petite Marie, L’encre de tes yeux… Et étonnamment, je prends toujours un plaisir fou à les chanter sur scène. Je ne suis pas du genre à renier le passé. Ces tubes rendent les gens heureux, et leur bonheur me ravit. Souvent d’ailleurs, les gens chantent avec moi.

Vous chantez quotidiennement ?

En public, pas si souvent. Mais chez moi, tous les jours. Je joue de la guitare, je compose, j’exerce ma voix, je répète. Tout au long de l’année 2024, j’ai une grosse tournée : Madrid, Barcelone, Lisbonne, Berlin, Varsovie, Anvers, Zurich, Los Angeles, New-York, Montréal, etc. Après, je prendrai une année ou deux de répit, pour rester tranquillement chez moi et composer.

Combien de guitares possédez-vous ?

Une trentaine dans une pièce et une autre trentaine dans mon studio. Je suis un maniaque de la guitare. J’en achète régulièrement parce que la nouvelle n’a pas le même son ou la même couleur ou parce que le travail du luthier est particulier. J’avais même tenté de trouver au Portugal une de ces magnifiques guitares portugaises. Mais il aurait fallu que j’apprenne à en jouer et cela me semblait bien compliqué.

À quel âge avez-vous eu votre première guitare ?

J’avais neuf ans et je l’ai encore ! J’en prends soin, je l’ai fait restaurer par des luthiers, ils ont remplacé les pièces qui étaient usées. À l’époque, je ne savais pas jouer. J’ai passé plusieurs années dans ma chambre à essayer de sortir des sons. On n’avait pas de télévision. Je n’ai pas eu d’exemple. Quand je suis entré au lycée, il y avait dans ma classe un garçon qui en jouait un peu. On s’est échangé des conseils.

Est-ce le texte ou la musique que vous créez en premier ?

La musique. Je joue tous les jours soit au piano soit à la guitare, il y a toujours un moment où une phrase musicale surgit par surprise, et je m’en sers pour bâtir la mélodie. Le texte peut suivre ou pas. Aujourd’hui avec les téléphones qui font cinquante choses à la fois, j’enregistre à la volée les mots ou les sons qui se bousculent dans ma tête sur mon dictaphone. Mais la plupart du temps, le texte éclot en séance de travail quand je suis vraiment concentré.

Vous travaillez chez vous ?

Oui dans le Lot-et-Garonne. Notre propriété est située à trois kilomètres du village où j’habitais avant. On a planté des vignes dont mon frère vigneron s’occupe. D’ailleurs, mon studio est au-dessus des chais et quand le raisin fermente, on en profite… Les effluves traversent les murs et les plafonds jusqu’au premier étage, et parviennent parfois à nous faire tourner la tête.

Comment êtes-vous perçu dans le village ?

Comme n’importe quel habitant. J’y suis né, ma famille y vit toujours. Mes parents sont décédés depuis peu, mais nous sommes tous restés. J’aime vivre au grand air. Je suis aussi président de l’école de musique et j’ai été conseiller municipal. Je m’intéresse à la vie des gens, je discute avec eux. J’ai créé des rencontres musicales autour du travail d’écriture. Nous fêtons la trentième édition cette année. Il n’y a pas que Paris, Toulouse ou Bordeaux. J’essaye d’apporter la culture dans nos campagnes

Êtes-vous d’une nature romantique ?

Je suis comme dans mes chansons, émotif et sensible. Quand je suis bouleversé, il m’arrive d’écrire. C’est cent fois plus facile de dire aux gens qu’on les aime en chantant. Même aujourd’hui alors que je suis plus vieux, je reste extrêmement timide, et jusqu’à l’âge de trente ans, c’était réellement handicapant. J’étais muet ! Sauf en chansons. Je peux même dire que chanter a été un remède, une thérapie. Je suis presque guéri…

Avez-vous toujours le trac sur scène ?

Oh, oui ! Pas tout le temps, mais juste avant d’entrer en scène et aussi dans les premières minutes du spectacle. Je suis toujours un peu inquiet. Non pas de l’accueil du public, mais de les décevoir ou de me tromper.

Comment vous définiriez-vous aujourd’hui ?

Je suis un serviteur de la chanson. C’est un peu démodé, mais je reste un amoureux fou de la langue française, porté sur la poésie. Un chanteur à l’ancienne de la même génération qu’Alain Souchon, Renaud, Véronique Sanson et bien d’autres. Loin de l’univers à paillettes. Nous sommes arrivés avec nos textes, au naturel et nous sommes toujours là.

Quel est votre plus grand luxe ?

Avoir du temps et j’ai assez bien réussi, puisque tout en ayant du succès, j’ai pris mon temps. Le temps d’écrire et de composer, de voir grandir mes trois filles, mes deux petits-enfants et de m’en occuper. J’aime aussi me promener, voir des copains, pratiquer du sport. J’en ai besoin pour me régénérer et maintenir vivace le désir d’écrire.

Propos recueillis par Yetty Hagendorf

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