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Les chinois relancent l’amour

Le nombre de mariages est en train de repartir à la hausse, et même le nombre de bébés! Ils sont forts, ces Chinois quand même.

par Adriana Dopio
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Depuis quelques années, on le sait, la baisse du taux de fécondité affole le gouvernement. Les jeunes ne se marient plus et ont des enfants très tard. Cette année 2024, la démographie chinoise a été dépassée par l’Inde ! Dans dix ans, il y aura, en Chine, autant de retraités qu’en Amérique ! Un choc mortifiant pour ce gouvernement fier de son capital de 1,4 milliard de Chinois, de sa population « jeune et active ». À cause du chômage, du ralentissement économique – des notions récentes là-bas –, les Chinois ne voient pas l’intérêt de fonder une famille.

Souvenons-nous de la politique de l’enfant unique jusqu’en 2015, ces enfants-rois, enfants-tyrans devenus ingérables, mais qui ont quand même stimulé l’économie. Et qui, désormais, n’ont pas envie de se priver pour procréer. Souvenons-nous des parents hors-la-loi qui risquaient le pire, les amendes, l’ostracisme, l’obstruction administrative, en ayant un deuxième enfant. Aujourd’hui les autorités devraient les féliciter, ces « mauvais citoyens » !

Voilà, tout est pardonné. Et l’État continue de mener son peuple à la baguette. Lequel est de moins en moins obéissant. Sauf  quand on le prend par les bons sentiments. Ainsi, pour encourager les jeunes de moins de 25-30 ans à se marier, et vite, l’administration a organisé au prin-temps dernier des speed datings géants sous les pêchers en fleurs. Pique-niques, jeux, peinture sur ombrelle, pêche à la crevette… Ils ont mobilisé tous leurs neurones pour trouver des occupations romantiques afin de faire connaissance, mais des activités pas trop longues pour pouvoir changer de partenaire si ça ne « matchait » pas. Il paraît que les jeunes ont bien aimé. En Chine comme à Paris, ou à Lisbonne, tout ce qui aide à « pécho » est bienvenue.

Se mêler de la vie intime de sa progéniture, c’est normal en Chine. Je sélectionne un conjoint pour mon enfant parce que je le connais mieux que lui-même. Chaque week-end dans de nombreuses villes, les parents se retrouvent dans un parc public avec leur pancarte de « vente » de candidat(e ) : sexe, âge, taille, job, classe sociale, caractère… Parfois ça marche. Mais si le jeune est déjà amoureux d’une autre qui ne plaît pas à la famille, c’est le drame : éjectée, quelle que soit l’intensité des sentiments entre les tourtereaux. On obéit, c’est ainsi.

Alors quand les slogans étatiques ordonnent : « Laissez fleurir la passion, cueillez l’amour pour rendre la vie plus intense, plus belle, plus sucrée », eh bien, on fonce sur la friandise. Il semble que déjà un frémissement s’observe dans les chiffres.

D’autres coups de pouce ont sans doute aidé : la prime à la mariée de moins de 25 ans – plus elle est jeune, plus elle aura d’enfants. Élémentaire ! –, l’allongement du congé parental, la baisse des charges autour de l’accouchement et… une idée scandaleuse : cette proposition de loi  qui autoriserait les célibataires à congeler leurs ovocytes. Impensable pour un pays qui n’envisage pas une seconde de défendre le statut de mère célibataire, comme chez ces dépravés d’Occidentaux. Beaucoup de femmes n’ont pas attendu la loi pour franchir le pas. Elles vivent dans une grande ville, sont commerçantes indépendantes, elles ont une mère qui peut faire la nounou, elles ont un bébé toutes seules. Pas envie de jouer les esclaves auprès d’un mari qui, comme le veut la tradition, ne fait rien à la maison. Elles courent des risques : se faire mal noter au tableau de bord des « bons citoyens », voir donc leur périmètre de mobilité se restreindre, leur bébé risque de ne pas décrocher son certificat de naissance ni ses papiers administratifs pour réussir dans le pays ; quant à l’employeur de la mère indigne, borné et obéissant, il va lui faire payer cette déviance impardonnable.

Depuis 2016, les bureaucrates sont pourtant obligés de délivrer le certificat de naissance avec ou sans la preuve de parents mariés, ensuite, l’employeur est tenu de faire une demande d’assurance santé pour le bébé de son employée. Beaucoup refusent, en province surtout où les gens sont rétrogrades ; ce qui oblige la femme à lui faire un procès. Il y a encore du chemin… Certes, les dirigeants chinois ne manquent pas de culot… et de naïveté : ils entendent piloter la libido de leurs citoyens avec le bâton et la carotte. Ils oublient une évidence : au-delà de la récession économique, plus on est éduqué, moins on a envie de faire grandir ses enfants dans une dictature.

• CATHERINE SCHWAAB

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