Vous résidez au Portugal et avez conservé une partie de votre patrimoine en France ? Vous habitez à l’étranger, mais vos enfants vivent en France ? Expert des successions franco-portugaises, David Martins, conseiller en gestion de patrimoine chez Laplace au Portugal, nous éclaire.
En quoi consiste l’activité de Laplace?
Notre cabinet accompagne les Français à l’international depuis 1992 dans la gestion de leur patrimoine. Nous conseillons nos clients sur la sécurisation et la structuration de leurs biens selon leurs projets de vie et les aidons à déployer une stratégie intégrant des solutions d’investissement pertinentes au cours du temps.
Pour cela, nous mobilisons nos ressources internes d’ingénierie patrimoniale et nos partenaires locaux des métiers du droit comme du chiffre, sous la forme d’un guichet unique. Nous avons développé une expertise unique sur les problématiques des expatriés.

Quelles sont ces problématiques spécifiques rencontrées par les expatriés?
Certains se focalisent sur la dimension fiscale de l’expatriation, vue comme une aubaine dans le cas du Portugal. Or, ce n’est que la conséquence d’une combinaison de facteurs et de choix de vie.
Toute mobilité internationale a des conséquences en matière de protection sociale (prévoyance et santé) et de retraite. Pour les chefs d’entreprise, la question de l’organisation du patrimoine professionnel entre plusieurs pays est déterminante, du développement de leurs activités à la cession ou la transmission de leur entreprise.
La connaissance de l’environnement légal et administratif, français comme portugais et interétatique, avec une vision transversale de ces sujets est impérative dans la construction d’une stratégie patrimoniale personnalisée. La planification successorale, dans un contexte franco-portugais, est particulièrement emblématique.
Qu’implique une succession internationale?
Le traitement d’une succession combine des dimensions juridiques, civiles et fiscales, dont la complexité est accentuée dans un contexte international. Quand on décède résident d’un pays différent de celui de sa nationalité, que les biens du défunt sont répartis dans différents pays, ou que des héritiers résident dans un autre pays, il s’agit d’une succession internationale.
Ce type de succession, entre le Portugal et la France, est appelé à se multiplier dans les prochaines années, du fait du retour au pays d’une partie des premières générations d’immigrés portugais en France et de l’installation de nombreux Français au Portugal, séduits par les attraits du pays, parmi lesquels une politique fiscale favorable bien qu’amoindrie.
Quels sont les risques à ne pas anticiper sa succession?
La liquidation du régime matrimonial pourra être régie par le droit d’un État autre que celui dont les époux sont ressortissants ou résidents, sans qu’ils en soient conscients.
La loi applicable à la liquidation civile de la succession sera par défaut celle de la dernière résidence habituelle du défunt, or le droit successoral portugais diffère du droit français sur la désignation des héritiers, la quote-part leur revenant, ou sur la réserve héréditaire.
Au fiscal, le Portugal ne taxe pas les successions comme le fait la France, bien qu’un droit de timbre de 10 % soit prévu (pour les héritiers autres que le conjoint, le concubin ou les descendants et ascendants en ligne directe), mais la France est susceptible de taxer une succession ayant lieu entre la France et le Portugal : pour les biens situés en France systématiquement, pour l’ensemble du patrimoine mondial transmis si le défunt est reconnu résident fiscal français, ou pour l’ensemble des biens reçus par un héritier ou légataire ayant été résident fiscal français 6 ans sur les 10 dernières années.
Ainsi, pour des expatriés français installés au Portugal, la France ne taxera que les biens situés en France?
C’est plus compliqué que cela. Le facteur d’incertitude est lié à la détermination de la résidence fiscale du défunt, comme des héritiers, puisqu’elle ne suit pas les mêmes règles en matière successorale qu’en matière d’imposition sur le revenu : il n’y a pas de convention fiscale entre la France et le Portugal en matière de succession.
La France pourra considérer comme ayant son domicile fiscal en France, en matière de succession, toutes les personnes « qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques » (article 4 B du Code général des impôts). Dans ce cas, la France taxera au-delà de ses frontières.
Comment peut-on anticiper sa succession en étant un Français installé au Portugal?
Il convient d’abord de sécuriser les aspects civils liés à sa succession, en choisissant la loi applicable à son régime matrimonial et à sa succession.
Une fois la loi applicable à sa succession choisie, par exemple la loi française pour les ressortissants français, il est possible d’exploiter l’ensemble des dispositifs prévus par le Code civil français dans l’organisation et l’anticipation de sa succession, en sécurisant leur application dans un contexte international.
Est-ce que l’assurance-vie, très largement utilisée en France, reste pertinente pour un Français expatrié au Portugal?
Il s’agit d’un outil incontournable en matière d’anticipation successorale, celle-ci permettant de transmettre des capitaux aux bénéficiaires de son choix, hors masse successorale, tant d’un point de vue civil – n’étant pas soumis aux contraintes de la réserve héréditaire – que fiscal, tant en France qu’au Portugal.
Il faut toutefois s’interroger sur la pertinence de conserver un contrat d’assurance-vie en France, notamment pour ce qui est de la fiscalité des rachats effectués par l’assuré au cours de sa vie. Pour un Français installé au Portugal, la souscription d’un contrat d’assurance-vie luxembourgeois nous semble la plus pertinente : au-delà de la neutralité fiscale spécifique au Luxembourg, cette solution réduit pour l’assuré le poids de ses intérêts économiques en France.
dmartins@laplace-groupe.com | laplace-groupe.com




